Message de Monseigneur du 21 avril 2020. « Faut-il que le Fils de l’homme soit élevé ? »

Chers amis et diocésains d’Eure & Loir,

En ce jour, nous accompagnerons notre frère prêtre Raymond Stephan lors de la messe de ses funérailles puis son corps sera déposé au cimetière saint Chéron à Chartres dans le caveau des prêtres du diocèse. Beaucoup de fidèles l’ont connu car il a parcouru notre diocèse dans plusieurs paroisses où son coeur offrait une grande place aux pauvres et aux gens à la marge. Sa prédication était engagée pour que les chrétiens se bougent afin que l’Evangile transforme la société et les structures sociales. Qu’il repose sur le sein de Dieu, en paix, dans la lumière qu’il a recherchée et annoncée.

Ainsi, à la suite de Jésus-Christ, notre chemin nous conduira à être à notre tour « élevé », élevé de terre pour vivre dans la Gloire du Ciel. Ce mot est au coeur du témoignage rendu à Jésus : « et moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir.» (Jn 12, 32-33) Ce verbe est celui qui désignait la crucifixion, c’est à dire être élevé sur une croix. Mais il ne suffit pas d’y voir un sens physique, soit le corps mis en hauteur, car ce verbe grec inclut aussi l’exaltation. Pour Jésus, être élevé fut assurément concret et dramatique mais simultanément il recevait du Père la glorification qu’il lui avait redemandé quelques heures auparavant dans sa prière dite sacerdotale « Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde existe. » (Jn 17, 5)

Pour l’Eglise naissante que saint Luc décrit dans le livre des Actes des apôtres, le témoignage de Jésus est d’avoir été élevé de terre, c’est-à-dire crucifié sur une croix, y être mort avec les signes concrets de sa mort que sont le côté transpercé du coup de lance et la mise au tombeau. Tout est bien là dans ce drame pour attester de sa mort : la descente de croix, les linges, la pierre roulée, les gardes mis par les juifs, la troisième journée. Mais cela ne serait qu’une triste et banale histoire de crucifixion d’un pauvre accusé s’il n’y avait pas eu la résurrection. Cinq chapitres de l’Évangile développent des rencontres diverses durant les quarante jours qui suivront, avant l’ascension.

Cependant le témoignage qui touchera les auditeurs, c’est la force intérieure et spirituelle qui dynamise les apôtres et les disciples pour témoigner au risque de leur propre vie et partir vers des pays lointains. Cet élan pastoral confirme la résurrection. Pourquoi ? Jamais ces hommes et ces femmes n’auraient été aptes à déployer ce feu missionnaire sans la conviction totale que Jésus est vraiment ressuscité et qu’il demeure avec eux par la présence de l’Esprit Saint opérant signes et prodiges. Jamais ils n’auraient engagé leur vie jusqu’au martyre, si cela s’était résumé à transmettre un enseignement de bonne moralité.

Plusieurs fois, ils diront : « Quant à nous, nous avons vu et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde. » (1Jn 4, 14) et la belle introduction de la première lettre de saint Jean « Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. Oui, la vie s’est manifestée, nous l’avons vue, et nous rendons témoignage : nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s’est manifestée à nous. » (1Jn 1, 1-2) Là est la force du témoignage de leur foi chrétienne : le Christ est mort et il est ressuscité pour le salut des hommes.

Nos vies sont bouleversées comme celle d’une catéchumène « Un jour, une évidence, l’appel me traverse, difficile à exprimer et expliquer, j’ai besoin de rentrer dans la famille des Chrétiens, de me rapprocher de Dieu. Sa souffrance pour nous sauver,… savoir pardonner et donner. Avec tout ça, comment ne pas vouloir être un enfant de Dieu ? » et une autre m’écrit « Après l’étude de la Bible que j’ai trouvée stupéfiante et magnifique, j’ai découvert une véritable famille au sein de l’Eglise et à présent je prie sans honte en écoutant chaque lueur de bienveillance et d’amour de Dieu notre Père. » C’est peut-être votre cas. La foi est d’abord reçue par la transmission, mais elle devient personnelle quand le chrétien fait l’expérience de la présence du Seigneur dans son histoire, non pas tout le temps, mais en certaines occasions et lieux. Alors tout change pour celui ou celle qui reconnait là ce que d’autres ont vécu avant lui, une rencontre avec le Bien-Aimé qui modifie le cours de sa vie.

Dans les actes des apôtres, on voit l’audace de ces hommes qui en appellent à la puissance de l’Esprit Saint pour qu’il agisse : « Étends donc ta main pour que se produisent guérisons, signes et prodiges, par le nom de Jésus, ton Saint, ton Serviteur. » (Act 4, 30) Alors ils sont remplis de l’Esprit Saint. Notre église invoque-t-elle toujours et assez la force de l’Esprit Saint avec une telle conviction ? Sommes-nous libres de le faire dans nos rencontres ? Ne laissons pas la peur nous limiter, mais osons nous laisser embraser par lui. D’ailleurs de nombreux chrétiens ont ouvert leur être à l’Esprit de charité, déployant un trésor d’imagination pour multiplier les oeuvres de compassion particulièrement envers les pauvres. Le miracle est dans cette patiente continuité qui dure une vie entière au service des autres. Comme saint Conrad de Parzham fêté ce mardi qui fut moine capucin et portier à Altötting en Allemagne, joli sanctuaire marial, homme reconnu pour sa douceur, sa patience, sa capacité à consoler et son attachement indéfectible à Marie, la mère de Dieu vénérée en ce lieu aujourd’hui encore. La vie charismatique prend de multiples formes, mais elle a toujours ce point commun résumé par saint Paul « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi. » (Gl 2, 20)

Quel sera notre témoignage de la résurrection du Christ ? Nous ne pouvons pas voir Dieu, rappelle Jésus. Cependant le Fils nous a fait connaitre le Père. Et nous voyons comment l’Esprit de Dieu agit à travers les dons et les charismes qu’il communique aux disciples ouverts à son action. Pensons à l’urgence de faire connaitre le Christ. L’Ecriture dit « afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. » (Jn 3,15) Je me rappelle cette vieille femme en maison de retraite chez les petites sœurs des pauvres à Rome, tout affaiblie, qui disait en priant sans cesse : « il faut prier pour les âmes, car quand une âme se perd, quel drame. » Faut-il croire pour avoir la vie éternelle ? La réponse appartient à la Miséricorde de Dieu. Le Christ est venu sauver tous les hommes, dit saint Paul. Mais il ne faudrait pas qu’une partie de l’humanité refuse le Christ faute de le connaitre en vérité. Nous sommes ses témoins en ces jours.

Maintenant je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.

Et nous nous confions à la prière de la Vierge Marie, avec l’Angelus :

V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.

Je vous salue Marie, ….

V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.

Je vous salue Marie…

V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.

Je vous salue Marie…

V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.

Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection. Par le Christ, notre Seigneur.

publié par Pierre-André