Homélie du Père Jean-Pierre pour le 4ème dimanche de Carême
Frères et Sœurs Chrétiens, en ce 4ème dimanche du Carême, l’Église nous invite à la joie. C’est la joie de ceux qui se préparent au baptême la nuit de Pâques. Nous pensons bien aux catéchumènes de notre paroisse (Franck, Camille, Emilie et Cassandra ). Pour les premiers chrétiens, ce sacrement était le point de départ d’une rupture avec l’existence qu’ils avaient connue jusque-là. Ils venaient d’un monde sans Dieu dont la vie n’avait pas de sens. Ils avaient le sentiment que c’est seulement par le baptême qu’ils commençaient à vivre vraiment. Le baptême nous arrache à une vie sans issue. Il nous offre de participer à la vie divine. Nous avons tous besoin de retrouver cette force et cette joie des premiers chrétiens.
Ce temps du Carême pendant lequel s’est ajouté le confinement, est une chance qui nous ouvre un chemin de conversion. La première lecture nous invite à nous ajuster au regard de Dieu sur les personnes et les événements : « Dieu ne regarde pas comme les hommes. » Les hommes regardent les apparences. Dieu voit la grandeur de celui qui est petit, faible et méprisé. Au moment de choisir un roi dans la famille de Jessé, personne n’avait pensé au petit David qui était aux champs en train de garder les troupeaux. Dieu ne voit pas comme nous; Il se sert des petits et des humbles pour réaliser de grandes choses. À travers ce message, Dieu voudrait nous apprendre à avoir le même regard que lui.
Dans la seconde lecture, Dieu nous parle de la lumière spirituelle : c’est elle qui nous permet d’avoir le regard de Dieu sur le monde. S’adressant aux chrétiens d’Éphèse et à chacun de nous, confinés dans nos maisons, il dit : « Autrefois, vous étiez dans les ténèbres. Maintenant, dans le Seigneur, vous êtes devenus lumières. » Vivre en « enfant de lumière » c’est arrêter de voir et de raisonner à la manière du monde, c’est se laisser guider par la lumière qui est en Jésus, c’est avoir, comme lui, un regard plein de miséricorde.
Et dans l’Évangile de ce dimanche, nous voyons précisément des disciples qui raisonnaient à la manière du monde. Face à un homme aveugle de naissance, ils posent la question qui les préoccupe : « Qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » Cette question rejoint les nôtres : « D’où viennent les souffrances, les épidémies, les catastrophes qui accablent de plus ne plus de personnes aujourd’hui ? Est-ce une punition de Dieu pour nos péchés ? Aujourd’hui, Jésus nous apporte une réponse : ces malheurs ne viennent pas de Dieu. Dieu est un Père qui aime chacun de ses enfants. Il nous a envoyé son Fils Jésus pour « chercher et sauver ceux qui étaient perdus. » Les épidémies, les catastrophes ne nous invitent-elles pas à une relecture, une prise de conscience, une remise en question des systèmes mis en place par l’homme lui-même ; notre relation avec Dieu ?
Oui, chers paroissiens, cet aveugle sur la route, c’est toute l’humanité. Elle est plongée dans les ténèbres de l’ignorance religieuse et du péché. Jésus a vu toute cette détresse. Et il continue à venir pour nous apporter la véritable libération. Ils sont nombreux ceux et celles qui s’égarent sur des chemins de perdition. Beaucoup sont aveuglés par leurs certitudes, leur orgueil. Beaucoup se détournent du vrai Dieu pour s’attacher à l’argent, aux richesses et aux petits bonheurs qui ne peuvent vraiment les combler ; c’est de cet aveuglement que Jésus veut nous guérir.
Dans l’Évangile, nous voyons Jésus qui guérit un mendiant aveugle de naissance. Il lui ouvre les yeux deux fois. Il commence par lui rendre la vue qui lui permettra de voir les personnes et le monde qui l’entoure. Il lui ouvre aussi les yeux de la foi. Tout cela se fait progressivement. Dans un premier temps, l’homme guéri parle de « l’homme qu’on appelle Jésus » ; ensuite il voit en lui un prophète ; puis quand il se trouve devant lui, il se prosterne en disant : « Je crois, Seigneur. »
Comme cet homme, nous sommes appelés à passer des ténèbres à la foi. Nous aussi, nous sommes souvent aveugles ou malvoyants. Cet aveugle-né est le symbole de l’humanité plongée dans les ténèbres. Mais par le baptême, elle découvre la Lumière du Christ. Pour ces nouveaux convertis, c’est une illumination. C’est la Parole de l’Évangile de saint Jean qui s’accomplit : « Le Verbe était la Lumière, qui, en venant en ce monde, illumine tout homme. »
Face à cet homme guéri et sauvé, il y a tous ceux qui sont aveugles dans leur esprit et dans leur cœur ; il y a ceux qui s’enfoncent dans leur aveuglement qui est celui du péché. Comme le hibou ou la chouette, ils sont aveuglés par la lumière du jour. La Lumière de Dieu, la Lumière de la Vérité leur fait peur. Mais nous ne devons pas avoir peur de la Lumière de Jésus Christ ; il se présente à nous comme le soleil qui rendra lumineuse notre vie. Vivre le Carême, c’est accueillir cette lumière qui vient de Jésus. Cette lumière c’est celle de la foi. Elle nous aide à voir les personnes et les événements que nous traversons actuellement avec le regard de Dieu. Comme l’aveugle guéri, nous deviendrons des témoins du Christ. Nous pourrons proclamer notre foi avec fierté : « Je crois en Dieu qui est lumière, Je crois en Dieu, il est mon Père. » Amen