Message de Monseigneur Christory du 7 avril 2020, mardi de la Semaine Sainte
Chers amis et diocésains d’Eure et Loir,
En ce mardi, permettez-moi un message un peu différent puisque normalement c’est une journée où l’évêque à Chartres retrouve tous les prêtres qui se rassemblent pour renouveler leur communion sacerdotale, se préparer aux fêtes pascales, et c’est une journée qui se conclut par la messe chrismale – mot qui fait référence à la chrismation ou encore à l’onction d’huile – à laquelle participent les diacres du diocèse. À cause du confinement, cette messe n’a pas lieu cette semaine et sera reportée au mardi 26 mai qui précède la Pentecôte en espérant que nous puissions nous rassembler nombreux.
La messe chrismale est une belle liturgie au cours de laquelle est consacré le saint chrême et sont bénies les huiles destinées aux catéchumènes et aux malades. Le saint chrême sert à oindre les nouveaux baptisés, à signer les confirmands, oindre les mains des prêtres et la tête des évêques lors de l’ordination, les églises et les autels pour leur dédicace. L’huile des catéchumènes sert pour préparer et disposer les catéchumènes au baptême et les soutenir dans le combat qu’ils ont à mener en vue de leur conversion. L’huile des malades est utilisée pour soulager les malades au cours du sacrement des malades. Ces huiles sont le signe de la force de l’Esprit qui descend sur ceux qui en sont marqués.
Au cours de la messe chrismale, a lieu la rénovation des promesses sacerdotales. L’évêque redit sa détermination à être « fidèle à la charge apostolique qui lui est confiée » et demande la grâce de « mieux tenir au milieu de son peuple la place du Christ qui est Prêtre, Bon Pasteur, Maître et Serviteur de tous. » Puis les prêtres renouvellent leurs promesses de « vivre toujours plus unis au Seigneur Jésus et chercher à lui ressembler, en renonçant à soi-même, en restant fidèles aux engagements, attachés à leur mission dans l’Eglise, intendants des mystères de Dieu par l’annonce de la Parole, par l’Eucharistie et les autres célébrations liturgiques, en accomplissant ce ministère avec désintéressement et charité. » Enfin les diacres expriment leur sainte détermination « dans l’annonce de l’Evangile, à garder et proclamer le mystère de la foi, à prier et à célébrer la Liturgie des Heures, en intercédant pour le Peuple de Dieu et pour le monde entier. » Chacun s’engage à demeurer un serviteur selon le sacrement de l’Ordre reçu.
La messe chrismale est normalement célébrée le jeudi saint matin, mais elle peut être avancée pour des raisons pratiques pour permettre la présence de tous. Le pape Saint Paul VI, en 1970, a voulut faire de cette messe la fête du sacerdoce, ce qui donne aussi une belle occasion au clergé de se retrouver pour un bon repas sauf… en 2020 ! La préface de la messe donne le ton et le sens de cette célébration : « c’est lui, le Christ, qui choisit dans son amour pour ses frères, ceux qui, recevant l’imposition des mains, auront part à son ministère. Ils offrent en son nom l’unique sacrifice du salut à la table du banquet pascal : ils ont à se dévouer au service de ton peuple pour le nourrir de ta Parole et le faire vivre de tes sacrements; ils seront de vrais témoins de la foi et de la charité, prêts à donner leur vie comme le Christ pour leurs frères et pour toi. »
Il est bon d’avoir conscience que, célébrée le jeudi saint, la messe chrismale est reliée à la sainte cène du jeudi soir durant laquelle nous lisons dans l’épitre de Saint-Paul aux Corinthiens l’institution de l’eucharistie par Jésus qui prit du pain et dit « ceci est mon corps », et la coupe de vin en disant « ceci est mon sang versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés » (1 Co 11, 23-26). Ce soir là nous fêtons aussi l’institution du sacerdoce en lisant dans l’Évangile de Saint-Jean le lavement des pieds qui est le signe éminent que Jésus se fait serviteur de tous, nous pourrions presque dire esclave de ses frères, et qu’il les invite à faire de même.
Lors de la messe chrismale, nous écoutons la promesse de l’Esprit que transmet le prophète Isaïe : « Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur. » (Is 61, 1-2a) Isaïe continue par : « Vous serez appelés « Prêtres du Seigneur » ; on vous dira « Servants de notre Dieu. » Vous vivrez de la ressource des nations et leur gloire sera votre parure. » (Is 61, 6). De qui parle-t-il ? En fait de tout le peuple d’Israël, qui cessera d’être persécuté comme il le fut en exil. Il passera de la condition de paria à celle de prêtre des nations pour être consacré au sanctuaire de Dieu et à l’enseignement de la Torah. C’est dorénavant la vocation de toute l’Eglise, et en ces jours de confinement, nous redécouvrons l’appel des parents à faire de leur maison une demeure du Seigneur et à y enseigner à leurs enfants la Parole. C’est dorénavant Jésus-Christ qui se fait serviteur pour que chacun vive de l’Evangile et reçoive toutes grâces. Il est serviteur celui qui dit dans l’Apocalypse de Saint-Jean : « À lui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang, qui a fait de nous un royaume et des prêtres pour son Dieu et Père (…) Moi, je suis l’Alpha et l’Oméga, dit le Seigneur Dieu, Celui qui est, qui était et qui vient, le Souverain de l’univers. » (Ap 1, 5.8)
Aussi l’Évangile de Saint Luc présente la scène à Nazareth au début du ministère public de Jésus quand il vient à la synagogue et qu’il lit ce même passage d’Isaïe : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. » (Lc 4, 18a) La nouveauté de cette scène est l’affirmation que c’est « aujourd’hui que cela s’accomplit » (Lc 16, 21). On comprend la surprise des auditeurs tout tendus pour écouter le jeune rabbi Jésus. Qui comprendra ? Plus loin, la situation va vite se durcir et déjà on s’oppose à ce qu’il dit « À ces mots, dans la synagogue, tous devinrent furieux. » (Lc 16, 28). La Parole de vérité trouve vite contradicteur !
En ce mardi, ne perdons pas notre joie en face du combat à mener. Jésus est déjà vainqueur de ce combat et de la mort vers laquelle le diable voulait nous entrainer. Pour nous, Jésus est le grand prêtre de l’alliance nouvelle et éternelle scellée par sa mort et sa résurrection et il rejoint toutes les situations de péché, de pauvreté et de deuil pour les conduire par le pardon à la joie. Comment cela se fait ? Par les sacrements, de manière éminente par le précieux corps de Jésus. Là est la première participation du prêtre qui par sa consécration devient un autre Christ et agit « in personna Christi », soit en tant que Christ en personne. Quelle est belle la vocation sacerdotale qui rend présent Jésus l’époux de l’église ! Quelle est belle la messe qui relie le Ciel et la Terre en faisant descendre dans les oblats du pain et du vin celui qui est l’Amour et qui se donne à chaque fidèle ! Quelle est belle l’étole que revêt le prêtre pour cacher son humanité et devenir Christ, proche de chacun, particulièrement les plus fragiles ! Qu’il est beau le pardon qui vient libérer l’âme du pénitent pour lui rendre la ressemblance d’avec Dieu !
Prêtres, nous sommes heureux d’avoir été appelés en faisant le choix de répondre totalement dans un célibat pour le Royaume, ayant été confirmés par l’Eglise. Ils ne sont pas nombreux aujourd’hui ces hommes qui entendent cet appel et acceptent ce don total. Mais ils sont bénis d’un amour particulier qui vient de Dieu et qui passe aussi par la Vierge Marie, Mère céleste des prêtres. Nul doute qu’elle prend soin de ses fils prêtres. Elle les protège sous son voile maternel. Il y a là une communion mystérieuse puisqu’elle fut elle-même pleinement saisie par l’Esprit et que l’Esprit veut complètement saisir ces hommes pour rendre présent le Fils et opérer le Salut. Qui voudra répondre à cet appel parmi les jeunes hommes de l’Eglise ?
En guise de conclusion, comment ne pas remercier du fond du cœur ceux et celles qui, dans la maladie et la souffrance, offrent leur vie et leur prière pour les prêtres ? Tout prêtre se sent accompagné. Votre prière et votre amour fraternel leur sont tellement précieux. Ils tissent des liens invisibles et pourtant bien réels entre nous au sein de l’Eglise. Merci !
Maintenant je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Et nous nous confions à la prière de la Vierge Marie, avec l’Angelus :
V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.
Je vous salue Marie, ….
V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.
Je vous salue Marie…
V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.
Je vous salue Marie…
V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection. Par le Christ, notre Seigneur.
R/ Amen.
Mgr Philippe Christory
Maison diocésaine
22 avenue d’Aligre
28000 Chartres
Confinement : pour aider le diocèse par la quête en ligne :Vidéo de nos prêtres