Message de Monseigneur Christory du Samedi 21 mars
Chers amis et diocésains d’Eure et Loir,
Bonjour à vous tous qui êtes confinés. Nous sommes samedi et la tradition de l’Eglise est d’honorer particulièrement la Vierge le samedi, car elle précède la venue de Jésus-Christ qui est fêté chaque dimanche – le Jour du Seigneur – dans sa résurrection dont je vous parlais hier.
Vous avez pu prier avec moi l’Angelus que j’ai mis en fin de message. J’aime cette prière qui est ancienne et qui rappelle l’incarnation : Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. Je voudrais vous en dire quelques mots. C’est une prière que nous disons trois fois par jour, normalement à la « première » heure du jour, à la sixième puis à la douzième. Si nous comptons 12 heures de jour, cela veut dire que nous la prions à 6h du matin, 12h et 18h. Normalement les cloches des villages sonnent alors par trois fois pour les trois invocations entre lesquelles est dit un Ave, puis elles battent à la volée pour la prière finale. Bien entendu, pour respecter le sommeil des personnes qui ne vont pas toutes aux champs dès l’aurore, les cloches sonnent souvent l’angelus vers 8h du matin voire 9h !
Certes, cette prière a été oubliée par beaucoup. Or nos papes l’ont ré-adoptée, surtout depuis Pie XI, et qui va à Rome aime se retrouver place Saint Pierre à midi pour l’Angelus avec le Saint Père qui ajoute alors un bref message. J’aimerais vous lire les propos du pape Saint Paul VI dans son exhortation « Marialis Cultus » de 1974, assurément un des plus profond texte marial du XXème siècle :
L’Angélus
41. « Nos propos sur l’Angélus veulent être seulement une simple mais vive exhortation à conserver l’habitude de le réciter, lorsque et là où c’est possible. Cette prière n’a pas besoin d’être rénovée : sa structure simple, son caractère biblique, son origine historique qui la relie à la demande de sauvegarde dans la paix, son rythme quasi liturgique qui sanctifie divers moments de la journée, son ouverture au mystère pascal qui nous amène, tout en commémorant l’Incarnation du Fils de Dieu, à demander d’être conduits « par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection », font que, à des siècles de distance, elle conserve inaltérée sa valeur et intacte sa fraîcheur. »
Historiquement, dès que l’Eglise a approfondi sa compréhension de la personne de Jésus, elle a compris que sa Mère avait un destin unique. Quand l’Eglise voulut affirmer que Jésus est Dieu fait homme, alors elle donna à Marie le titre « Θεοτόκος – Mère de Dieu » au Concile d’Ephèse en 431. Les chrétiens du IVème et Vème siècles introduisirent dans leurs prières la salutation faite par l’ange à Marie. Un graffiti à Nazareth du Ier ou du IIème siècle dit « kyrie Maria » soit « je vous salue Marie ». Ce salut apparaît dans la prière de l’Ave qui nous est si familière maintenant. Les gens simples qui ne pouvaient réciter les psaumes en latin disaient 150 Ave formant la première couronne pour Marie qui deviendra peu à peu notre rosaire. Quant à prier l’Angelus, ce fut progressif au bas-Moyen Âge, tout d’abord celui du soir, puis du matin, puis du milieu du jour entre le XIII et le XVème siècle. L’art soutenait cette attention à ce moment unique de la rencontre de l’Ange et de la Vierge. Comment ne pas penser à Fra Angelico, aux peintres italiens, flamands ou français ? Ce fut aussi dans le contexte de la lutte contre les turcs envahissant l’est de l’Europe que s’est accrue la foi que la Vierge nous protégeait d’un tel mal. La victoire de Lépante en 1571 sera vue comme celle du pape priant le chapelet avec toute l’Eglise.
Ces prières vers Marie nous protègent. Si certains ont pensé que la dévotion mariale était récente, il faut écarter cette fausse idée. Un papyrus du IIIème siècle porte la prière du « Sub Tuum praesidium »; voici une traduction de ce texte grec « A l’abri de votre miséricorde nous nous réfugions, Mère de Dieu, ne repoussez point les demandes de notre indigence, mais sauvez-nous du péril, ô vous, seule chaste et bénie. » Ainsi nous voyons que les premiers chrétiens expérimentaient la force de l’intercession de Marie face aux calamités. Saint Irénée mort en 202 appelait Marie « notre avocate » pour bien signifier sa protection. Or nous y sommes avec le coronavirus. Nous demandons à Marie sa protection pour la France qui lui est consacrée. Mais comment la recevoir si la France ne se convertie pas ? « France, qu’as-tu fait de ton baptême ? » disait Saint Jean-Paul II.
Pourquoi insister sur la place de Marie au XXIème siècle ? Elle nous conduit à Jésus, dans la vérité de sa personne, homme et Dieu. Elle nous dit qu’elle a accueilli le Sauveur pour nous et pour toute l’humanité. Elle nous rend familier l’Evangile qu’elle a médité et gardé en son coeur de Mère. Plus nous sommes proches d’elle, plus nous sommes avec Jésus, et gardés de l’erreur. Elle a tout reçu de Lui et notre vie chrétienne consiste, comme pour elle, à ouvrir notre coeur afin qu’il soit le réceptacle de toutes les grâces et que par elle nous apprenions à aimer toujours plus.
En ce samedi, vous comprendrez pourquoi j’insiste sur notre prière du chapelet et de l’Angelus. Je voudrais vous dire que dans cette grave épreuve sanitaire, il y a des gens en grande détresse : Les sans-logis, les SDF – certains ont même été verbalisés ! – qui ne savent pas où trouver refuge. Beaucoup de lieux d’accueil sont fermés. Curé, à la Sainte Trinité à Paris, nous y avions quatre repas par jour, avec 200 personnes par jour, où vont-ils maintenant ? Je pense aussi aux hommes et femmes sans papier. L’un d’eux me disaient hier par téléphone : « Père Philippe, comment peut-on vivre ? Nous n’avons pas de papier, pas de justificatif à montrer à la police, nous vivons dans des lieux insalubres chez des marchands de sommeil, nous sommes exploités comme esclave moderne, aujourd’hui il ne nous reste rien ». Je prie et remercie tous ceux et celles qui oeuvrent dans des structures d’accueil face à la précarité. Je me souviens du gite de Dreux où en appelant le 115, 25 personnes trouvaient un lit pour un soir. Je pense au FAC, le Foyer Accueil Chartrain, dont les responsables m’ont si aimablement accueilli où logent de nombreuses personnes en précarité. Je revoie cette femme vivant seule avec trois enfants très blessés pour un père qui les avaient violentés et qui venait retirer un grand panier de fruits, de légumes et de conserves dans une association de Courville car elle touchait environ 450 euros par mois. Que deviennent ces personnes ?
Merci à tous ceux qui vont continuer de se rendre proche des pauvres, des anciens, des malades. En priant la Vierge Marie, décuplons notre attention envers eux.
En ce samedi je vous bénis au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Et nous prions l’angelus :
V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.
Je vous salue Marie, ….
V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.
Je vous salue Marie…
V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.
Je vous salue Marie…
V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection. Par le Christ, notre Seigneur.
R/ Amen. Mgr Philippe Christory
Evêché – 1 rue Saint Eman 28000 ChartresMaison diocésaine 22 avenue d’Aligre 28000 ChartresTél : 02 37 21 19 92 / 07 85 60 80 32