Message de Monseigneur Christory du 2 avril 2020. Joie et Parole.
Chers amis et diocésains d’Eure et Loir,
Pourquoi le pape appelle-t-il son exhortation « l’Évangile de la joie » ? Le mot Évangile, à l’origine en grec, signifie une nouvelle que quelqu’un transmet et qui dit que quelque chose advient « maintenant ». Le pape Benoît XVI insistait sur ce sens subtile du « maintenant ». Par exemple un messager courait d’une ville à l’autre en Grèce pour apporter une nouvelle qui pouvait être bonne ou mauvaise, par exemple une victoire ou une défaite.
L’Évangile de la joie signifie ainsi la Nouvelle de la joie qui advient maintenant. Sommes-nous, en tant que chrétiens, des naïfs qui, à force de dire le mot joie, pensons que nous serons joyeux ? Que nenni. C’est bien un don de l’Esprit Saint dont parle Saint-Paul dans son épître : « voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. » (Gl 5, 22) La vie dans l’Esprit suscite en nous la joie. Certes non pas l’excitation, ni le rire extérieur comme lorsqu’on écoute un humoriste, mais cette joie subtile et intérieure dans l’âme. Ainsi, « demeurer dans la Parole » (Jn 8, 31), comme le demande Jésus, permet de goûter cette joie dont la source est Jésus-Christ lui-même : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jn 15, 11) Une joie parfaite est-elle possible ? Ici-bas, notre coeur est blessé par le péché, et la perfection ne peut advenir, mais nous pouvons vraiment y tendre dans la confiance que la Miséricorde de Dieu est plus grande que notre péché et que la grâce ne manque pas à ceux qui mettent leur confiance en Dieu. Nous aurons aussi besoin d’une foi qui s’incarne en charité, comme le vivent ceux et celles qui prennent soin de autres en cette crise sanitaire et je pense aux proches d’une personne en situation de handicap que l’on garde à la maison, demandant des soins et de la tendresse à tout instant.
Dans le passage de saint Jean lu ce jour à la messe, Jésus dit : « si quelqu’un garde ma Parole, jamais il ne verra la mort. » (Jn 8, 51) Quelle promesse étonnante ! Le corps va mourir, mais l’âme est destinée éternellement à la Gloire de Dieu. La Parole vivante, c’est Jésus-Christ, le Verbe divin, qui vient habiter le cœur du croyant et le met définitivement en relation avec Dieu le Père. Ce lien est éternel. Il commence au baptême, est nourri par les sacrements, est entretenu par l’union à Dieu dans la prière. Le Seigneur recherche des adorateurs, il veut les combler de sa joie et de sa paix.
Que signifie « garder la Parole » ? Le christianisme n’est pas une religion du livre. Nous n’adulons pas un livre. Nous affirmons que l’écriture a Dieu pour auteur qui, par l’Esprit, inspira des hommes pour mettre par écrit l’essentiel des paroles et des faits, dans une expression liée à leur culture et leur histoire, signifiant la présence de Dieu effectivement à l’œuvre. L’Ecriture Sainte lue dans l’Esprit Saint, ce qui sous-entend avec la foi, dévoile non seulement un message mais une présence. Quand le croyant-lecteur entre en relation avec cette présence, celle-ci suscite la joie intérieure de l’âme. Certes la Parole peut être décapante car « elle est vivante, la Parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée à deux tranchants ; elle va jusqu’au point de partage de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles ; elle juge des intentions et des pensées du cœur. » (Hb 4, 12) C’est donc une expérience quotidienne du croyant que d’entrer en relation avec Jésus-Christ à travers la méditation et la mémorisation de la Parole. La Parole est ce trésor que nous portons en nous, elle est le coeur de la vie chrétienne, voici pourquoi nous prenons au sérieux la demande de Jésus de garder sa Parole.
Nul doute que la Vierge Marie nous soit présentée par l’évangéliste Saint Luc comme la première disciple car « elle gardait dans son cœur tous ces événements » (Lc 2, 19.51) ce qui veut dire toutes les paroles qui lui furent dites de la part de Dieu. Certes, durant sa vie, l’Évangile n’est pas déjà un texte écrit. Mais la Bonne Nouvelle se déploie devant ses yeux depuis l’Annonciation. Elle est maîtresse de vie spirituelle dans cette attitude à se laisser habiter par la Parole, que lui dévoile l’Esprit Saint, jusqu’à être témoin auprès des disciples. Aussi « toutes les générations la disent bienheureuse. » (Lc 1, 48)
L’exhortation du Saint Père François invite à recevoir la joie pour annoncer l’Évangile. Cela passe par notre familiarité avec la Parole sans laquelle il n’est pas possible de penser l’évangélisation. Celle-ci est certes un témoignage de vie , mais appelle notre intelligence fondée sur la maturation en nous de la Parole. Évangéliser n’est pas la transmission d’une émotion personnelle, mais d’une habitation intérieure de l’Esprit, source de vraie joie et de paix, qui devient irrésistible pour qui est rejoint par ce témoignage. Nous pourrions comparer cela avec un pianiste qui a tellement intériorisé sa partition qu’il est capable de la jouer de mémoire, laissant jaillir de lui-même la musique avec justesse mais surtout avec sa sensibilité et son expression particulières. Ainsi en va-t-il du saint qui joue la partition de l’Évangile avec son propre charisme intérieur soit éducatif, soit caritatif, soit mystique, etc. Le pape dit que « la présence de l’Esprit donne aux chrétiens une certaine connaturalité avec les réalités divines et une sagesse qui leur permet de les comprendre de manière intuitive. » (EG 119) La samaritaine touche ainsi les habitants de son village par son rayonnement personnel suite à sa conversation avec Jésus au bord du puits, mais ceux-ci diront après : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons : nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde. » (Jn 4, 42) C’est bien l’accueil de la Parole de Jésus qui change leur vie ! L’Esprit Saint nous emmène au Ciel et nous donne la Lumière qui se concrétise en joie. Soyons en les hérauts auprès des gens que nous pouvons appeler par téléphone pour qu’ils connaissent Jésus-Christ et son Eglise.
Maintenant je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Et nous nous confions à la prière de la Vierge Marie, avec l’Angelus :
V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.
Je vous salue Marie, ….
V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.
Je vous salue Marie…
V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.
Je vous salue Marie…
V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection. Par le Christ, notre Seigneur.
R/ Amen.
Mgr Philippe Christory
Maison diocésaine
22 avenue d’Aligre
28000 Chartres
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