Dimanche de la miséricorde. Homélie de Monseigneur Christory.

A Paray le Monial, Jésus montre son coeur à sainte Marguerite-Marie et déclare « voici ce coeur qui a tant aimé les hommes ». Aujourd’hui c’est la Fête de la miséricorde. Elle est universelle. Elle embrasse le monde entier car Dieu aime infiniment chacun de nous, les bons comme les méchants.

Cette fête fut demandée par Jésus à sainte Faustine Kowalska.

Accueillir la miséricorde voici l’urgence spirituelle ! Nous ne sommes pas qu’un corps. Or le premier remède pour nos personnes c’est la miséricorde divine qui s’incarne dans le pardon échangé avec Dieu et entre nous. Sinon nous serions condamné à la tristesse intérieure.

J’aimerais parler de la Miséricorde avec Sainte Thérèse de l’enfant Jésus. En effet, elle en est le chantre. La manuscrit A de « l’histoire d’une âme » commence par « les miséricordes du Seigneur ». Elle constate qu’il y a de grands saints et des saints cachés. Elle fait la comparaison avec les fleurs, et voit les belles roses et les petites violettes. Toutes appartiennent au jardin de Dieu. Si une manque, le jardin y perd quelque chose. Alors elle dit que s’il n’y avait que des grands saints, des docteurs de l’Eglise, Dieu ne s’abaisserait pas vers les plus petits. Aussi, la miséricorde de Dieu se manifeste dans son abaissement vers chacun de nous, les plus petits et aussi les pécheurs pour leur donner sa grâce et son pardon. Aussi ne craint-elle pas d’être petite !

1. textes liturgiques de ce dimanche : ils sont emplis de joie fraternelle !

Les Actes parlent de la vie fraternelle / la fraction du pain et de prières / tout mettre en commun / partager ses ressources / louer Dieu / prendre ses repas avec allégresse et simplicité de coeur. Merveilleuse vie de communauté chrétienne !
Ce passage est fondateur de notre vie d’église domestique, ce que nous vivons actuellement dans nos maisons, avec Jésus, dans l’écoute de la parole, jusqu’au lavement des pieds parfois.

La lettre de Pierre ajoute un surcroit de joie surnaturelle : nous avons une « vivante espérance », notre héritage est dans les Cieux est il appelle à une exultation de joie. Pourquoi ? car les âmes reçoivent de la victoire de Jésus leur salut

NB : ces textes ne parlent pas du mal commis pour lesquels il faudrait se repentir. On ne parle pas de péché pour lequel il faudrait demander pardon.

La miséricorde est un don gratuit, une grâce, qui veut nous faire participer à la joie du Ciel.

Dans l’évangile de Saint Jean, le textes décrit deux rencontres consécutives de Jésus ressuscité avec ses disciples.
Une parole de bénédiction « la paix soit avec vous » / Jésus souffla sur eux – don de l’Esprit / un envoi vers toutes les nations
Thomas incrédule est accueilli par Jésus « mets ta main dans mon côté, touche moi ». Et « cesse d’être incrédule ».
Le cri de Thomas et sa merveilleuse profession de foi jaillit alors « Mon Seigneur et mon Dieu ».

Le joie est la porte de la Miséricorde. Celle-ci nous conduit à la joie. C’est un cercle vertueux. Si nous nous plongeons dans la Miséricorde de Dieu, rien ne peut nous manquer.

2. Notre société peut-elle être touchée par la Miséricorde ?

La maladie et la mort placent l’homme devant la fragilité de la condition humaine. La société de consommation voulait convaincre que la possession des biens apporterait le bonheur. Mais l’expérience de la finitude et de la mort ou de la possibilité de la mort change tout. Nous avons besoin de fraternité et d’humanité. Nous avons besoin de relations. Or celles-ci sont fragiles et souvent blessées.

Il y a un besoin incroyable de miséricorde. Or certaines personnes ne connaissent pas ce mot.
Le pardon est l’acte par lequel la Miséricorde prend forme entre Dieu et nous et aussi entre nous.

Nous, membres de l’Eglise, nous ne prétendons pas changer la société, comme Jésus n’a jamais dit qu’il allait changer l’empire romain. Mais nous voyons la puissance de l’amour qui peut bouleverser les relations humaines, rapprocher ceux et celles qui ne se parlaient plus, apporter la paix entre les nations.

Demeure une question pour la société : quelle place existe pour le pardon ? La société civile peut-elle pardonner ?

Sommes nous vraiment disposés au pardon ?
Peut-être pas tant que cela. L’état vient de libérer avec avance près de 6000 prisonniers, à cause du peu de confinement dans les prisons et le danger du virus. Beaucoup pensent, et certains sont catholiques, qu’ils auraient dû rester en prison. Ceux-là même qui pestent à cause d’un confinement de huit semaines dans une maison parfois sympathique. Alors que les prisonniers sont confinés en cellule durant des années ! Et quelle cellule ? Or saint Paul dit que jésus est venu proclamer la délivrance aux prisonniers ! Quelle miséricorde pour ces prisonniers ?

Nous fêtons aujourd’hui la Miséricorde divine. C’est à dire que nous l’appelons sur nous, sur les autres, sur notre société. Personne n’est pas capable de la recevoir pleinement sans Dieu. Seul Dieu peut pardonner. Sans lui, c’est trop dur. Même le Christ en croix s’adresse au Père car son humanité est anéantie par tant de violence : « Père pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Force est de constater que la société des hommes ne pardonne pas. D’ailleurs le peut-elle ? Même un président qui gracie un coupable le dispense de sa peine, mais ne lui pardonne pas. Seule la personne offensée peut pardonner si cela lui est possible. Personne ne peut pardonner à la place d’une victime. Personne ne peut exiger de la victime qu’elle pardonne. Nous pourrions désirer voir célébrer le pardon au sein de la société civile. Mais elle est impuissante car seul Dieu pardonne. Le pardon est le propre de Dieu. Cela semble un acte de faiblesse or c’est l’expression ultime de sa puissance puisqu’il est Amour.

Oui, le pardon est l’oeuvre de Dieu dans le coeur de l’homme. Le pardon est le don au-delà de l’offense commise. Ce don est magnifique, mais il dépasse la raison car il ne calcule plus. Le pardon se donne sans mesure et sans condition. C’est justement l’oeuvre de la Miséricorde dans le coeur humain qui peu à peu opère une guérison jusqu’à la possibilité d’un pardon donné ou d’un pardon demandé. Souvent il faudra du temps.

Sans pardon, nous resterons malheureux, ankylosés dans un passé que nous avons l’art de ruminer. Or nous sommes créés à l’image de Dieu. Le mal a brisé l’image. Toute notre vie est en tension pour cheminer vers cette image perdue à cause du mal commis. Le chemin c’est le pardon vécu entre les personnes, pour renouer leur relation et avec Dieu dans le sacrement du pardon pour reprendre sa place de Fils dans la maison commune, l’Eglise. Alors la joie peut revenir.

Et la joie divine dispose à vivre dans la confiance. C’est l’expérience de sainte Thérèse de Lisieux dont je veux vous parler.

3. La miséricorde chez sainte Thérèse de Lisieux

Voici une sainte qui nait et grandit à une époque difficile car marquée par la justice de Dieu et la peur du jugement dernier. On est à l’époque du jansénisme, c’est à dire que l’on doute quant à la liberté et la capacité de l’homme à faire le bien. Il faut s’amender, faire pénitence.

Thérèse répond par la confiance. Elle dira : « C’est la confiance, rien que la confiance qui conduit à l’amour»

Elle dit qu’elle est comme un petit enfant qui veut monter un escalier car son Père est en haut mais qui n’y arrive pas. Aussi elle dit que si l’enfant continue à essayer même sans y arriver, c’est le papa qui va descendre pour la monter dans ses bras. Alors elle trouve l’image de l’ascenseur, installation nouvelle dans les beaux immeubles. Et elle dit : Tes bras ô Jésus seront mon ascenseur pour aller vers ton coeur.

Sa brève vie, elle la passe dans cette découverte de l’Amour : « je ne peux craindre un Dieu qui s’est fait si petit. Je l’aime ». Elle déclare souvent son Amour pour Jésus. Comment pourrait-il lui refuser sa grâce ?

Elle va jusqu’à dire, en juillet 1897, à sa sœur Pauline :
« Dites bien, ma Mère, que si j’avais commis tous les crimes possibles, j’aurais toujours la même confiance, je sens que toute cette multitude d’offenses serait comme une goutte d’eau jetée dans un brasier ardent ».

Cette confiance en Dieu, cette assurance envers l’infinie miséricorde de Dieu, elle l’applique dans sa relation avec les autres, c’est à dire les soeurs du Carmel. La plus petite occasion, comme ramasser une épingle, devient une grâce pour elle, un acte d’amour gratuite et invisible, un sacrifice d’amour : « Je comprends maintenant que la charité parfaite consiste à supporter les défauts des autres, à ne point s’étonner de leur faiblesse, à s’édifier des plus petits actes de vertu qu’on les voit pratiquer. » Ms C 12 r°)

Ainsi son désir de sainteté ne la plonge pas dans des pénitences extrêmes, mais dans les bras de Jésus son bien-aimé : « La sainteté n’est pas dans telle ou telle pratique, elle consiste en une disposition du coeur qui nous rend humbles et petits entre les bras de Dieu, conscients de notre faiblesse et confiants jusqu’à l’audace en sa bonté de Père. »

Elle est disposée à mourrir : « J’irais le coeur brisé de repentir me jeter dans les bras de Jésus, car je sais combien il chérit l’enfant prodigue qui revient à lui »
Dans un ultime murmure, elle déclare : « Je ne me repens pas de m’être livrée à l’Amour… Je l’aime !… mon Dieu, je vous aime ! ».

Conclusion

Cette fête de la Miséricorde est une grâce extraordinaire. Elle a ouvert un chemin nouveau de vie. Mais cela est très sérieux, pour que nous vivions en paix, en attendant la bienheureuse espérance, c’est à dire le Ciel.

Par cette fête, c’est le Ciel qui descend vers nous. Que nous ressemblions à une belle rose ou une petit violette, Nous avons chacun une place dans lE coeur de Jésus. Vivons de la Miséricorde et notre société sera transformée par l’odeur suave de l’Amour et du pardon. L’Amour est contagieux quand deux êtres le vivent profondément. C’est déjà le cas entre Jésus et chacun de nous. Reste à l’incarner entre nous par notre vie fraternelle joyeuse. Amen.

A Dieu Père Raymond Stephan !

Pour information, la messe de funérailles du père Raymond Stephan sera célébrée mardi 21 avril à 14h30 et retransmise en direct par vidéo sur le site du diocèse de Chartres.N’hésitez pas à faire dire une messe en action de grâce et pour le repos de son âme à partir du site jedonnealeglise.fr.

En ce temps de confinement, vous pouvez participer à la Quête de nos célébrations en utilisant l’appli La Quête sur un smartphone, ou le site jedonnealeglise.fr. Vous pourrez aussi demander une messe sur ce même site au curé de votre paroisse. Merci de tout coeur. Nous avons besoin de votre générosité !

publié par Pierre-André