Message de Monseigneur Christory du vendredi 26 juin 2020. « Qui vous accueille m’accueille, dit Jésus »
Depuis que les cloches de la cathédrale ne sonnent plus, il se fait un grand silence. N’y voyons pas un quelconque complot. L’usure des moteurs, des battants et des visseries, celle de la charpente en bois du XVIème siècle – dont la société chargée de l’entretien n’avait pas pris la mesure – ont conduit la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) à commander un audit complet des cloches. La négligence de certains privent les chrétiens de ces cloches qui rythmaient jusqu’à présent leur journée et leur prière. Cette triste affaire démontre la nécessité de veiller à notre patrimoine et le précieux conseil qu’apportent ceux qui connaissent notre cathédrale, nos guides notamment. Espérons que nous aurons rapidement des solutions, même temporaires, pour entendre le carillon des cloches de Notre Dame de Chartres.
Ce jeudi 25 juin, nous avons inhumé le corps du père Jean Robert, un prêtre de la Beauce qui a donné sa vie pour l’Église en Eure-et-Loir, un bon serviteur dans ses multiples ministères auprès de ses fidèles. Sa longue vie s’est achevée dans la maison-mère des sœurs de Saint-Paul de Chartres où il était soigné et entouré d’affection et de prières comme nous pourrions le souhaiter pour toutes les personnes âgées et dépendantes. Il fut un prêtre apprécié et nous l’avons confié à la miséricorde divine pour qu’il reçoive vite la place préparée pour lui par Jésus dans la Gloire éternelle. Là il deviendra un de nos nombreux intercesseurs qui sollicitent la grâce divine pour nous-mêmes.
Quand un prêtre âgé décède (plus de dix depuis que je suis évêque de Chartres) nous nous tournons vers Dieu pour que des jeunes hommes entendent sa voix les appeler à se donner et répondre à cette si belle vocation de pasteur. La vocation sacerdotale est devenue inhabituelle en France : seuls 125 prêtres sont ordonnés en France en 2020. Ce n’est pas rien, et nous pouvons rendre grâce. Mais c’est aussi bien peu. Être prêtre est synonyme d’un lâcher-prise et d’un abandon de tout ce qu’un homme peut désirer avoir : de l’argent et des biens, une famille, la reconnaissance de talents professionnels,… Cela est vrai. Mais il faut regarder le mystère du sacerdoce avec les yeux de la foi pour comprendre que l’accueil de l’appel du Seigneur à se livrer totalement pour son service n’enlève rien mais donne tout pour reprendre les mots du pape Benoît XVI. Dieu comble totalement ! Finalement ce que nous laissons derrière nous est redonné comme une mesure bien pleine, tassée et débordante. Combien de voyages et de pèlerinages ai-je faits ? Combien de familles m’ont ouvert leur porte si généreusement ? Combien de personnes m’ont dit que je suis leur père ? Un prêtre du diocèse, qui allait fêter 92 ans, me dit un jour « maintenant, vous êtes notre père ! ». Notre vie est une aventure à la suite de Jésus.
Dans mon dernier message, j’ai invité chacun à réfléchir particulièrement sur la notion d’Église domestique. Il est indéniable qu’au sein d’une famille priante et aimante un jeune garçon accueillera peut-être plus facilement l’appel de Dieu à devenir prêtre. Même des années plus tard ! Combien de prêtres peuvent témoigner avoir entendu cet appel dès le plus jeune âge ! Certes le modèle d’une famille chrétienne, priante, est moins commun aujourd’hui. Certains prêtres sont issus de familles athées. La famille est de plus en plus fragilisée. Beaucoup de membres de l’Église, laïcs et prêtres, prennent soin des personnes vivant une situation familiale difficile. Comment ne pas rendre grâce pour les personnes engagées au sein du Bercail à Chartres qui ont multiplié leurs efforts durant le confinement quand des femmes meurtries venaient frapper à la porte pour recevoir du secours ? Beaucoup de personnes vivent courageusement au sein d’une famille éclatée voire sans famille. Cependant notre effort doit être déployé par le soutien de ceux et celles qui choisissent l’engagement du mariage chrétien pour leur vie entière, qui élèvent leurs enfants dans la foi de l’Église, par la prière et la pratique religieuse. Ils servent l’Église selon leurs disponibilités tout en assumant un métier prenant. Ces familles sont comme les fines colonnes d’une église qui sont capables de porter ensemble la masse des murs et des toitures. Ne donnent-elles pas un témoignage qui rend désirable l’Évangile pour ceux qui les rencontrent ?
Nous ne pourrions cependant pas nous contenter de cela. Il faut bâtir des ponts et des lieux fraternels pour que ceux et celles qui désirent s’approcher de l’Église puissent être accueillis et cheminer avec d’autres. Personne ne doit être oublié. À chaque messe dominicale, ne pouvons-nous pas demander que lèvent la main les nouveaux venus et prévoir des personnes qui les rencontreront, leur proposant un contact et les invitant dans une fraternité ? Il est tellement triste d’entendre, comme cela arrive parfois, des personnes qui, alors qu’elles venaient dans une paroisse n’ont pas été accueillies. Même par un simple mot de bienvenue, une petite attention, une parole. Notre foi en Dieu a besoin de médiation, et chaque baptisé est ce médiateur au sein de sa communauté paroissiale.
L’été s’est installé, avec ses premières fortes chaleurs. Déjà des records sont atteints comme au nord de la Sibérie que l’on imagine toujours sous deux mètres de neige, où le thermomètre est monté à 38°. Je pense aux personnes en maisons de retraite confinées si longtemps et qui ne pourront pas sortir à cause des températures élevées. Mais l’été ce sont aussi les bains de mer, les promenades en forêts, les barbecues, les lectures dans un bon fauteuil, etc… Comment allons-nous nous ressourcer spirituellement ? Quelle retraite spirituelle sera possible ? Quelle paroisse allons-nous découvrir pour la messe dominicale ? Quelle lecture fera-t-on pour nourrir notre foi ? Il existe toujours le risque d’un relâchement, une paresse spirituelle. Dans la vie mystique, on parle d’acédie pour définir une forme d’ennui ou de dégoût qui nous font baisser les bras. Sans aller jusqu’au découragement, nous pourrions remettre à demain l’appel à nous rapprocher de Dieu. Alors comment ne pas mettre sous le boisseau notre élan spirituel ? Comment ne pas mettre entre parenthèses la vie pastorale de notre paroisse ? Comment continuer à se mettre au service ? Beaucoup de gens recherchent des projets nouveaux et innovants, en faveur d’une vraie écologie et des relations humaines de qualité. Mais les puissances de ce monde préparent la guerre avec des armements sophistiqués, investissant des sommes colossales. Le pape François nous dit qu’il faut désarmer le cœur de l’homme. Cela ne sera possible qu’en nous connectant à la source de la paix, de la vie et de l’amour. Cette source se nomme Jésus-Christ. Quelle est belle notre responsabilité d’intercéder et d’agir pour notre société et la présenter à la miséricorde de Dieu ! C’est la vocation très particulière des consacrés, des moines et les moniales mais c’est celle de tout chrétien. Ne baissons pas les bras, soyons fidèles, louons Dieu chaque jour et espérons toujours au-delà de toute espérance.
Dans les temps si particuliers que nous vivons, soyons des témoins infatigables ! Nous sommes nombreux à nous sentir, fort heureusement, en bonne santé, à peiner à imaginer que le virus qui a fait tant de morts et qui a fragilisé tant d’hommes et de femmes, soit toujours un danger ; c’est un devoir de charité que de veiller à la nécessaire prudence et à ne pas nous départir des mesures sanitaires qui doivent encore prévaloir.
Avec la Vierge Marie, livrons-nous maintenant à l’Amour.
Et je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Je vous propose de prier ensemble l’Angélus.
V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.
Je vous salue Marie, ….
V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.
Je vous salue Marie…
V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.
Je vous salue Marie…
V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de la résurrection. Par le Christ, notre Seigneur. Amen