Message de Monseigneur Christory du vendredi 29 août 2020. « Chaque fois que vous l’avez faità l’un de ces plus petits de mes frères,c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25,40)
Un homme français vient de gagner 157 millions d’euros à la loterie. Faut-il le féliciter ou le plaindre ? Une personne me disait que si c’était elle, elle donnerait au diocèse la moitié. Ce serait la fin des soucis ! Mais comme cette personne ne joue pas au loto, cela n’arrivera pas. Et c’est bien mieux ainsi ! Le pape François, si proche des pauvres quand il était évêque en Argentine, nous met en garde sur la puissance de l’argent. Il veut ouvrir nos yeux à la richesse que sont les pauvres. Déjà le diacre saint Laurent au IIIème siècle, sommé par l’empereur Valérien d’apporter l’argent de l’Église distribuait ses maigres réserves aux personnes démunies de Rome et affirmait que les pauvres sont la vraie richesse de l’Église. À sa suite, d’autres saints ont rappelé combien les pauvres nous enseignent. Ainsi, saint Jean Chrysostome « Si vous voulez honorer le corps du Christ, ne le méprisez pas lorsqu’il est nu… », ou encore saint Vincent de Paul « les pauvres sont nos maîtres ». Le pape François précise que « celui qui entend aimer comme Jésus a aimé doit faire sien son exemple, surtout quand on est appelé à aimer les pauvres. » Or la pauvreté prend de nombreux visages. Monseigneur André Vingt-Trois indiquait qu’une des nouvelles pauvretés du temps présent est la situation d’adultes en situation de handicap, notamment lorsque leurs parents décèdent. La pauvreté atteint les gens par des causes nombreuses, rappelle le saint Père : « par la douleur, par la marginalisation, par l’abus, par la violence, par les tortures et par l’emprisonnement, par la guerre, par la privation de la liberté et de la dignité, par l’ignorance et par l’analphabétisme… ». En Eure et Loir, nous constatons aussi la pauvreté rurale, particulièrement de certains éleveurs ou agriculteurs qui ne reçoivent qu’un maigre revenu pour un lourd travail. C’est surtout au travers d’événements comme la journée des pauvres qu’il nous apparait de plus en plus que les pauvres ne sont pas le problème mais la solution et que toute initiative envers eux ne peut aboutir qu’à partir d’eux.
À ce sujet, en ce début septembre, un évènement passe plutôt inaperçu mais j’aimerais le mentionner car il m’importe beaucoup. Voici plusieurs dizaines d’années, naissait à Chartres la communauté des Compagnons du Partage, un groupe de personnes vivant souvent dans la précarité et qui choisirent de partager un espace de vie et de travail. C’est dans la petite commune de Bailleau-l’Evêque que leur domaine fraternel s’est installé, à côté des bois et des champs. Depuis mon arrivée en Eure et Loir, j’ai bénéficié à plusieurs reprises de leur accueil et d’une assiette bien garnie à leur table. Une femme, Nicole, qui a accompagné ce beau projet depuis fort longtemps, les quitte. Sa volonté de discrétion est mise un peu à mal par mon message, mais comment ne pas honorer sa gentillesse, sa persévérance, sa simplicité, son entraide auprès de chacun ? Même l’État le reconnut quand elle reçut la légion d’honneur pour son engagement. Nicole laisse la place à d’autres personnes. Elle laisse la place au Seigneur Jésus-Christ à qui elle a toujours confié son engagement, car « Si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain. » (Ps 126, 1) Nicole, nous vous remercions, vous dont le franc parler fait tant plaisir car il cache votre grande sensibilité et votre bel amour pour tous.
Cette belle mission des Compagnons du Partage rappelle ce que l’Église appelle « l’option préférentielle pour les pauvres » qui est un principe élaboré par la doctrine sociale de l’Église inspirée par l’Évangile de Jésus-Christ. Elle encourage à donner la priorité à ceux et celles qui ont le plus besoin de notre solidarité, qui souvent ne peuvent pas se procurer par eux-mêmes ce qui est dû à toute personne : un toit, un repas, un travail, une éducation, un avenir. L’Église veut accompagner tout l’homme. Depuis son origine, elle œuvre pour les plus pauvres, les malades et les laissés-pour-compte. Jésus-Christ nous l’a enseigné : l’option préférentielle des pauvres est au cœur de la vie ecclésiale « car les pauvres vous les aurez toujours avec vous. » (Mt 14, 7). L’Église est présente auprès des pauvres dans le monde entier, là où il y a un bidonville ou des quartiers défavorisés, par quelques laïcs, volontaires, clercs ou religieuses. En effet, le Christ « lui qui est riche, il s’est fait pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté. » (2 Co 8, 9) Jésus s’est fait proche de tous les plus pauvres, comme sainte Teresa de Calcutta le vécut dans son service des plus pauvres, en soignant les mourants et les lépreux. Mais cette belle mission de solidarité ne peut pas se limiter aux soins et à l’entraide matérielle, car bien qu’étant à la marge de la société, tout homme a le droit de rencontrer le visage de Jésus-Christ. Elle ne cherche pas seulement à œuvrer pour un secours matériel mais aussi pour répondre aux besoins spirituels. Ne pas connaître le Christ est une autre pauvreté ! L’homme, tout homme, même inconsciemment, a soif de Dieu, de l’amour de Dieu. Cet amour n’est pas annoncé par les services sociaux et les initiatives laïques, si belles soient-elles, qui s’occupent des plus pauvres. L’Église doit continuer à s’engager pour porter le Christ car l’amour des pauvres s’inspire des béatitudes et révèle celles-ci à tout homme. Je l’ai un peu compris lorsque, jeune converti, je voulus donner de l’argent et des médailles de la rue du Bac à quatre hommes mendiants à la porte d’une église. Et voici que l’un d’eux, oubliant l’argent, se précipita sur moi pour m’embrasser en me remerciant pour ce cadeau de la Vierge Marie.
Ce thème de l’accueil des personnes en situation de pauvreté rejoint une thématique évoquée dans mon dernier message : la question des funérailles en nos églises. Vos échos à mes propos me sont revenus nombreux et c’est tant mieux. En effet, la question revêt une gravité toute particulière et vos réactions le prouvent. Beaucoup de gens se sont habitués à une réponse positive dès que l’on appelle l’accueil paroissial pour une date de funérailles. Souvent les pompes funèbres nous contactent en présence de la famille endeuillée pour dire que la célébration est demandée à telle date, à telle heure et dans tel village, que c’est ainsi puisqu’ils sont contraints par leurs horaires, la transport du corps et l’heure de fermeture du cimetière ou du crématorium. Un prêtre me disait il y a quelques jours que souvent l’Église est sollicitée comme prestataire d’un service funèbre. Régulièrement des familles demandent des musiques profanes, veulent dire des messages personnels mais ne sont pas spécialement désireuses du rituel. Une fois, il me fut demandé de ne pas utiliser de textes bibliques. Sommes-nous un prestataire ou une communauté croyante et vivante de Dieu ? Ce que nous célébrons lors des funérailles constitue une profonde prière pour demander au Seigneur le Salut de l’âme du défunt. C’est réellement plus important que de remémorer les bons moments du passé. Nous supplions Dieu de lui pardonner ses péchés, de lui ouvrir le Ciel et lui donner la Vie éternelle qui n’est pas acquise d’avance. Que faire quand l’assemblée ne croit pas, ne communie pas à la foi de l’Église ? Or les prêtres constatent qu’il est de plus en plus difficile d’être disponible, et que nos bénévoles laïcs si généreux pour animer les funérailles vieillissent. Les nouvelles générations ont tant d’obligations familiales et professionnelles qu’elles ne sont pas disponibles avec la même régularité. Nous avons moins de prêtres pour les célébrations même si nous pouvons compter sur des diacres en certaines paroisses.
En d’autres cultures on fait les choses différemment. Un prêtre ayant vécu au Pérou expliquait que dans les villages de montagne, lors d’un décès, c’est toute la population qui se rassemble à l’église, qui veille le corps, qui anime une longue prière, qui porte le corps en terre et qui entoure la famille. Tous assistent les personnes dans la peine comme tous savent qu’ils seront entourés lorsqu’un membre de leur famille décédera. Qu’en est-il chez nous ? Où sont les communautés villageoises lors d’un deuil ? Quelles sont les initiatives qu’elles pourraient assumer ? On pourrait imaginer que des fidèles prennent eux-mêmes en charge une veillée à l’église, animent des chants et guident la prière, coordonnent la célébration et président à la dépose du corps au cimetière. Souvent les proches ne souhaitent pas lire un bref texte biblique, aussi comment demander plus ? Si ma réflexion vous interpelle, j’aimerais vous entendre. C’est là une invitation que je vous envoie. En réalité, nous devons penser maintenant à l’avenir et faire toute chose nouvelle sous la conduite du Saint Esprit, avant de devoir refuser faute de personnes formées et disponibles. Mes amis, il en va de votre responsabilité de croyants. Rappelons-nous que la vocation de tout baptisé est d’annoncer la Parole à temps et à contretemps, et non pas d’écouter passivement l’homélie du curé pour s’en retourner chez soi en oubliant ce qu’il a dit. Prions pour être éclairés sur ces chemins nouveaux.
Heureusement l’Espérance est là. Celle qui nous fait voir le Ciel comme notre futur certain, puisque par le baptême, nous avons reçu notre laissez-passer pour l’éternité. Choisissons l’Espérance, et fixons-nous à elle car elle ne déçoit pas. Rappelons-nous que partout des frères et des sœurs prient pour nous, comme nous prions pour eux. Des contemplatifs offrent leur vie pour nous qui sommes aux croisés des chemins. Nous ne sommes pas seuls dans l’Église du Seigneur.
Avec la Vierge Marie, livrons-nous à l’Amour.
Maintenant je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Ensemble, prions l’Angelus.
V. L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie
R/ Et elle conçut du Saint-Esprit.Je vous salue Marie, ….
V. Voici la Servante du Seigneur
R/ Qu’il me soit fait selon votre parole.Je vous salue Marie…
V. Et le Verbe s’est fait chair
R/ Et il a habité parmi nous.Je vous salue Marie…
V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu
R/ Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Prions :
Que ta grâce, Seigneur, se répande en nos cœurs. Par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’Incarnation de ton Fils bien aimé, conduis-nous, par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de sa résurrection, par Jésus, le Christ notre Seigneur.